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Nom du blog :
cinemapaulvalery
Description du blog :
Blog des élèves de l'option cinéma du Lycée Paul-Valéry - Paris. Travaux - Critiques - Festivals
Catégorie :
Blog Cinéma
Date de création :
14.05.2009
Dernière mise à jour :
19.08.2012

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Entretien avec Sylvette Baudrot

Entretien avec Sylvette Baudrot

Publié le 18/06/2009 à 17:58 par cinemapaulvalery
Entretien avec Sylvette Baudrot
26 mai 2009

Par Thomas Brunot


J'ai rencontré Sylvette Baudrot dans le cadre du dossier que les élèves de lettres supérieures réalisent en option cinéma. J'avais choisi de travailler sur une scripte française. J'ai d'abord travaillé sur son fond d'archives à la BIFI, dans le bâtiment de la Cinémathèque Française. Elle a finalement accepté de me rencontrer, un après-midi, à la Fémis...


Sylvette Baudrot, comment êtes-vous devenue script ?

Je suis née à Alexandrie. Mes parents tenaient un restaurant français. À leur divorce, en 1938, mon père est parti en France et je suis restée en Egypte. J’ai passé mon Bac au Lycée français du Caire. Je suis arrivée à Paris en 1946. Mon père y tenait un cabaret, rue Cujas. Je ne voulais pas être à sa charge, alors j’ai travaillé dans une bijouterie, puis au studio Harcourt.
Un jour, sur le boulevard St Michel, je rencontre un ami qui avait passé son bac avec moi en Egypte. Il était accompagné par quatre copains. Ils faisaient des études de médecine, sauf l’un d’entre eux qui était à l’IDHEC. Je ne connaissais pas l’IDHEC. Il m’apprend que c’est l’école du cinéma et je décide d’essayer d’y entrer. J’ai passé le concours une première fois en 1947. Il n’y avait à l’époque qu’une seule section. Il fallait écrire un résumé des quatre premiers tomes des Thibault de Roger Martin du Gard. J’ai échoué. Je l’ai repassé l’année suivante et j’ai raté à nouveau. J’en ai conclu que je n’étais pas faite pour être réalisatrice, ni scénariste. J’ai quand même demandé si je pouvais suivre des cours en auditrice libre. Le directeur a accepté. Parallèlement à mon travail, j’ai donc suivi des cours à l’IDHEC. La pratique m’était interdite, mais j’avais accès aux enseignements théoriques. J’ai rencontré des étudiants, parmi lesquels Claude Sautet et Jacques Rozier. Je suis devenue scripte sur leurs courts métrages de fin d’études. Ce furent mes premières expériences de scripte. Mais rien n’était gagné car, pour avoir la carte de scripte, il faut avoir fait quatre stages sur des plateaux professionnels.
L’été 1948, j’étais serveuse sur la Côte d’Azur. Le film Vire-vent de Jean Faurez se tournait au même endroit et je voyais souvent Roger Pigault, l’acteur principal. Il me proposa comme stagiaire mais la scripte du film ne voulait pas de stagiaire... De retour à Paris, il me présenta à la scripte du film Manège d’Yves Allégret. Nous étions trois à postuler, elle nous prit toutes les trois ! C’était bien la première et la dernière fois que je voyais trois stagiaires scriptes ! Je me souviens d’Yves Allégret lui disant sur le plateau « Voulez-vous bien dire à votre mur de scriptes de s’asseoir ! ». Par la suite, j’ai été stagiaire sur Orphée de Cocteau et j’ai obtenu ma carte professionnelle.

Puis vous avez travaillé sur des plateaux américains…

Mon grand avantage était de parler couramment l’anglais. J’ai abandonné l’arabe en 6ème pour préparer un bac avec du latin et de l’anglais. L’arabe m’aurait pourtant plus servi que le latin dans ce métier. En 1950, il y avait 40 scriptes, aujourd’hui il y en a 250. Vous étiez donc bien plus recherchée si vous parliez anglais. C’est grâce au directeur de production et régisseur Christian Ferry que j’ai travaillé sur des plateaux américains. En 1951, j’ai été sur Attol K, le dernier « Laurel et Hardy », avant de travailler plus régulièrement pour des metteurs en scène tels que George Stevens, Vincente Minnelli, Stanley Donen…

Vous venez de finir Les Herbes Folles… Comment a débuté votre collaboration avec Alain Resnais ?

Il souhaitait adapter Hiroshima mon amour de Marguerite Duras et il fallait tourner à la fois en France et au Japon. Resnais souhaitait deux esthétiques radicalement différentes. Il y avait deux équipes distinctes qui n’ont pas tourné avec les mêmes pellicules. Les Français ont utilisé du Kodak et les Japonais du Fuji. Pour parler avec l’équipe japonaise, il fallait parler anglais. Je me souviens très bien de mon rendez-vous avec Resnais. Nous étions trois scriptes à postuler. Je l’avais retrouvé dans un café, avec Marguerite Duras. Il m’avait demandé quel était mon genre de film préféré. « J’ai un faible pour les comédies musicales américaines ». Il avait répondu rêveur : « Ah… oui, moi aussi ». Quand j’ai rappelé chez Marguerite Duras pour savoir si j’étais admise dans l’équipe, elle m’a dit qu’il était absent et qu’elle avait oublié le nom de la jeune fille retenue. Puis elle m’a demandé : « Est-ce vous qui aimez les comédies musicales américaines ? ».

Comment qualifieriez-vous la relation d’une scripte et d’un metteur en scène ?

Travailler pour la première fois avec un réalisateur c’est comme lorsque l’on ne connaît pas une voiture que l’on vient d’acheter. Petit à petit, les mécanismes vont se roder. Par exemple, la première fois que j’ai travaillé avec Jacques Tati sur les Vacances de Monsieur Hulot, il m’a dit : « Ecoutez-moi bien, je n’ai pas besoin de scripte, j’ai tous les raccords en tête ! ». Je n’ai rien répondu jusqu’à ce qu’il y ait la scène du pot de peinture et celle du kayak. Lorsqu’il a fallu refaire les prises, Tati s’est rendu compte que seule la scripte savait ce qui n’allait pas dans le plan précédent. Lorsque l’on note qu’une prise n’est pas bonne, il est surtout important de noter pourquoi elle n’est pas bonne. Avec lui, mon principal travail concernait les raccords. Plus qu’avec d’autres metteurs en scène. Lorsqu’il m’a demandé de retravailler avec lui pour Mon Oncle, puis pour Playtime, j’ai été très flattée. C’est toujours valorisant pour un technicien qu’un metteur en scène vous demande. Lors des Vacances de Monsieur Hulot, j’avais été sollicitée par Billy Wilder. Je m’étais déjà engagée avec Tati. J’ai donc refusé. Mais j’aurais adoré travaillé avec Wilder !

Et la relation avec l’ensemble de l’équipe ?

Ils ont tous besoin de moi, et moi j’ai besoin d’eux ! Lorsque l’on est scripte, il ne faut pas avoir peur de mettre son amour-propre de côté, de faire toutes les remarques nécessaires, en n’oubliant jamais que c’est « du boulot ». Lors du tournage du Locataire, où je travaillais pour la première fois avec Roman Polanski, il y a eu un accrochage à propos d’une descente d’escalier. Polanski devait descendre la poubelle en imperméable. Les plans où il passe dans la cour avaient déjà été tournés et ceux de l’escalier devaient donc être raccords. « Poubelle main gauche ! » dis-je plusieurs fois à Polanski avant de tourner le plan. Il jette la poubelle en hurlant : « Je m’en fous de votre raccord et de votre poubelle ! ». Lors de la prise suivante, je lui signale : « Col déboutonné ! ». Toute l’équipe me regarde, affligée, en se disant : « Elle l’a déjà mis hors de lui, ça ne lui suffit pas ! ». Lui ne dit rien, reboutonne son col, et il a finalement fait la prise avec la poubelle dans la bonne main. Ainsi, quand la production de Tess m’a appelée pour à nouveau être sa scripte, j’ai été très dubitative jusqu’à ce que l’on me dise : « C’est lui qui vous a demandée ! ».

Vous dites que beaucoup de scriptes changent finalement de métier pour devenir metteurs en scène, monteuses, directrices de production… Le rôle de scripte n’est en effet pas celui d’une créatrice. Cela ne vous a jamais gênée ?

Jamais. Un metteur en scène doit avoir de l’imagination. Une scripte doit avoir une implacable logique. C’est le plus important. J’ai commencé il y a 60 ans maintenant. C’est mon métier et je ne voudrais pas en changer !

Vos méthodes de travail ont-elle évolué depuis 1949 ?

Non ! Je travaille toujours exactement de la même manière. Je n’ai ni téléphone portable, ni Internet. Par exemple, j’ai toujours un sac plastique sur moi pour écrire mes fiches raccords lorsqu’il pleut. Je n’ai jamais changé de méthode. Le métier de scripte est avant tout un métier de logique, de rigueur, d’attention. Il me convient parfaitement.